web analytics

La Coalition pour Les Droits Des Femmes Africaines lance un appel fort

Dans une déclaration ferme et sans équivoque, La Coalition SOAWR , un consortium de plus de 70 organisations de défense des droits des femmes dans 33 pays africains œuvrant pour la défense des droits des femmes en Afrique, a lancé un appel à l’action et à la redevabilité en conformité avec les objectifs des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre. La Coalition se déclare profondément préoccupée par la lenteur avec laquelle se concrétise la promesse d’égalité des sexes faite aux femmes et aux filles africaines par les États membres de l’Union africaine lors de l’adoption du Protocole de Maputo en 2003. Cet appel souligne nécessité impérieuse pour les États membres de l’Union africaine de réagir de manière proactive et d’accélérer la réalisation de cette promesse par la ratification universelle, la domestication et la mise en œuvre du Protocole de Maputo.

En juillet de cette année, la Coalition SOAWR, en collaboration avec le gouvernement du Kenya et la Direction Femmes, Genre et Jeunesse de l’Union Africaine, a célébré le 20ème anniversaire de l’adoption du Protocole de Maputo et a lancé le rapport « 20 ans du Protocole de Maputo : où en sommes-nous aujourd’hui ? » notant que les gouvernements africains devaient faire plus pour que les droits inscrits dans le Protocole de Maputo puissent être pleinement mis en œuvre et avoir un impact positif sur le vécu des femmes et des jeunes filles du continent.

Lors d’une conférence de presse organisée à Mombasa (Kenya) à l’occasion des 16 jours d’activisme, la Coalition a mis l’accent sur l’importance de la ratification et de la mise en œuvre effective du Protocole de Maputo. Le Protocole est un instrument juridique novateur adopté par l’Union africaine le 11 juillet 2003, que 44 des 55 pays africains ont ratifié et déposé les instruments de ratification. Il répond aux défis uniques auxquels sont confrontées les femmes et les filles en Afrique. Le Protocole tient compte des défis particuliers auxquels sont confrontées les femmes et les jeunes filles en Afrique. Ce texte offre un large éventail de droits portant sur des questions telles que le mariage, la santé et les droits sexuels et reproductifs, la protection contre la violence, l’élimination des pratiques néfastes (notamment les mutilations génitales féminines et les mariages d’enfants), la participation politique et l’émancipation économique des femmes. En créant des cadres juridiques et en garantissant l’accès à la justice, le Protocole de Maputo a contribué de manière significative à l’amélioration de la vie de millions de femmes, à la promotion de leur autonomisation économique et sociale et à la promotion d’un environnement d’égalité et de justice.

L’appel à l’action et à la responsabilité met en outre l’accent sur les points suivants:

[Nous exhortons les dix États spécifiques à] Ratifier immédiatement le Protocole de Maputo, en soulignant l’engagement collectif pris par tous les chefs d’État et de gouvernement des États membres de l’UA en 2003 et en 2010.
Adopter et faire appliquer efficacement des mesures législatives visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, à éradiquer les pratiques culturelles néfastes et à lutter contre la violence faite aux femmes.
Adopter des mesures visant à garantir l’égalité des droits pour les femmes au sein du mariage et à différents stades de la vie
Promouvoir la représentation des femmes dans les processus décisionnels et leur garantir l’égalité des chances dans le milieu du travail.
Protéger le droit des femmes à la santé et adopter une législation contre les pratiques culturelles néfastes.
Soumettre des rapports périodiques en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, démontrant leur engagement à réaliser pleinement les droits des femmes et des filles énoncés dans le Protocole de Maputo.

Neuf pays invités instamment à ratifier le Protocole de Maputo.

Dans cet appel, la Coalition demande à neuf Etats d’agir rapidement pour ratifier le Protocole de Maputo afin de faire respecter les droits des femmes et des filles dans leur pays. Elle appelle la République du Burundi, la République du Tchad, la République arabe d’Egypte, la République d’Erythrée, la République de Madagascar, le Royaume du Maroc, la République du Niger, la République de Somalie et la République du Soudan à ratifier d’urgence cet instrument progressiste et appelle également la République du Botswana, qui a récemment ratifié le Protocole de Maputo, à déposer son instrument de ratification auprès de l’Union africaine.

Ratifier le Protocole de Maputo signifie qu’un pays adhère aux diverses dispositions de ce traité qui visent à défendre les droits des femmes et des jeunes filles. En outre, un instrument juridiquement contraignant permettra à un pays d’être tenu responsable du respect de ces dispositions » Oluwaseyitan Solademi- Ibrahim (Centre des droits de l’homme, Université de Pretoria). « Les pays qui n’ont pas ratifié le Protocole de Maputo exposent les femmes et les jeunes filles à des risques supplémentaires lorsqu’il s’agit de certaines protections relatives au développement économique, au leadership, aux mutilations génitales féminines et à la violence fondée sur le genre », a-t-elle fait remarquer.

La Coalition appelle en outre les gouvernements africains à adopter des lois solides assorties de sanctions sévères visant à interdire explicitement les pratiques culturelles néfastes, notamment les mutilations génitales féminines (MGF), les mariages non consensuels et les mariages d’enfants. Le rapport de l’UNICEF (2022 )sur l’égalité des sexes révèle une situation grave ; les statistiques indiquent que plus de 200 millions de filles et de femmes ont subi des mutilations génitales féminines (MGF), tandis que plus de 4,3 millions de filles sont encore menacées en 2023. Malheureusement, les progrès ont été limités dans les pays à forte prévalence de MGF tels que la Gambie, la Guinée, le Mali, la Somalie et le Soudan.

Rapports inadéquats sur la situation des droits des femmes et des filles.

Même si le Protocole de Maputo est l’instrument qui est entré en vigueur le plus rapidement par rapport à tous les autres traités de droits de l’homme, la Coalition, qui compte plus de 70 membres, a exprimé sa déception en ce qui concerne la présentation des rapports sur la mise en œuvre du traité. Elle a noté que le niveau de conformité des Etats membres dans la soumission des rapports périodiques était arbitraire et inadéquat. « L’article 62 de la Charte africaine et l’article 26 du Protocole de Maputo obligent les États membres à soumettre régulièrement des rapports sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Protocole de Maputo après l’avoir ratifié, afin de rester redevables vis-à-vis de leurs promesses envers les femmes d’Afrique. Malheureusement, seuls 19 Etats membres africains ont soumis leur rapport initial », a noté Hannah Forster (ACDHRS).

Outre la ratification, les pays sont invités à passer à l’action.

« Ceci peut être accompli en formulant, en adoptant et en mettant en œuvre des lois et autres mesures qui garantissent les droits des femmes, en reflétant un engagement à faire progresser les droits des femmes à travers le continent », a souligné la directrice d’Equality Now pour l’Afrique, Faiza Mohamed.

Le Protocole de Maputo confère aux femmes et aux jeunes filles le droit de maîtriser leur fécondité, d’exercer leur libre choix en matière de contraception et d’accéder à l’avortement médical, notamment en cas d’agression sexuelle, de viol ou d’inceste, et lorsque la poursuite de la grossesse présente des risques pour la santé mentale ou physique de la mère ou pour la vie de la mère ou du fœtus.

L’Organisation mondiale de la santé (2020) souligne que la santé sexuelle et de reproduction reste un sujet préoccupant. Une note d’information préparée par Equality Now (2023) sur la situation du mariage des enfants en Afrique indique que le continent compte 127 millions de mariages d’enfants dans le monde et occupe la deuxième place après l’Asie. Environ 31 % des femmes âgées de 20 à 24 ans en Afrique se sont mariées avant l’âge de 18 ans. L’Organisation mondiale de la santé (2020) note que les cinq pays présentant les taux les plus élevés de mariages précoces sont le Niger (76 %), la République Centrafricaine (68 %), le Tchad (67 %), le Mali (54 %) et le Sud-Soudan (52 %). 17 % des femmes en Afrique subsaharienne et 23 % des femmes mariées ou en union libre n’ont pas accès à des services de planification familiale.

En Afrique australe, le Mozambique est l’un des pays de la SADC où la prévalence des mariages des enfants est la plus élevée. Le nombre de filles et de femmes de tous âges mariées pour la première fois ou en union avant l’âge de 18 ans est de 4,4 millions, ce qui représente plus d’une fille sur deux (53 %) mariée avant l’âge de 18 ans. Les autres pays où la prévalence est élevée sont la Tanzanie (5,7 millions), Madagascar (2,9 millions), l’Angola (2,5 millions) et le Malawi (2,2 millions).

En outre, chaque année environ 5,2 % à 17,2 % des décès maternels en Afrique subsaharienne sont attribués à des avortements, comme l’a indiqué l’Organisation mondiale de la santé en 2020.

« Le fait d’accorder aux femmes et aux jeunes filles le droit d’accéder aux services de santé de reproduction éliminerait le risque de grossesses précoces et non planifiées, d’avortements pratiqués dans des conditions dangereuses et d’exposition aux maladies sexuellement transmissibles, et réduirait la probabilité d’abandon scolaire », a encore fait remarquer M. Mohamed.

Adopter et appliquer des mesures législatives.

La déclaration stipule en outre que dans la poursuite urgente de l’égalité des sexes et de la protection des droits des femmes dans les nations africaines, les chefs d’État et les décideurs politiques devraient adopter et faire appliquer des mesures législatives et réglementaires. En outre, ces mesures serviraient à interdire et à éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles, en s’attaquant aux inégalités persistantes dans les cadres juridiques. « Des actions correctives et positives sont essentielles, en particulier dans les domaines où les pratiques discriminatoires à l’égard des femmes persistent dans la loi », a déclaré Rainatou Sow – Make Every Woman Count (MEWC).

De plus, conformément à son Plan stratégique 2020-2024la la Coalition SOAWR, a lancé un appel ferme aux pays pour qu’ils puissent adopter et appliquer des mesures législatives, administratives, sociales et économiques globales en vue de prévenir, punir et éradiquer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles. La date butoir pour atteindre les ODD approchant à grands pas, « Le moment d’agir est arrivé ; on s’attend à un engagement inébranlable de la part des décideurs politiques en vue d’établir un environnement juridique et social qui favorise l’égalité des sexes et préserve le bien-être et la dignité des femmes et des filles sur l’ensemble du continent », précise la déclaration.

Verified by MonsterInsights